La Tour d'Ambleteuse n'a pas livré tous ses secrets !
Publié le 13 juin 2024
par Bertrand Spiers
Mis à jour le 25 juillet 2024
En 2023, l’association des Amis du fort d’Ambleteuse a demandé à Christian Corvisier, historien de l’architecture, un rapport sur le monument, l’idée étant de lever les derniers secrets entourant la fortification érigée en bord de mer sous Louis XIV.
Le 20 juillet 1680, Louis XIV et sa suite de militaires et d’ingénieurs visitent le littoral du nord de la France, la France est alors en guerre contre les Pays-Bas. Après s’être arrêté à Boulogne, le Roi Soleil écoute Vauban lui vanter les mérites d’un port de guerre dans l’estuaire de la Slack.
Pourquoi Ambleteuse ? Le roi d’Angleterre, Henri VIII, avait érigé ici, deux siècles auparavant, une citadelle à cinq bastions de terre (et non de pierres) surélevés, flanqués de canonnières, suivant en cela le système bastionné inventé par les Italiens. Louis XIV découvre le site, observe la rade formée par l’estuaire de la Slack qui se remplit à chaque marée. Les galères du Roi Soleil trouveraient à Ambleteuse un hâvre naturel propre à renforcer l’arsenal militaire royal face aux navires de guerre hollandais.
Alors commissaire général des fortifications depuis 1678, Vauban est l’homme tout trouvé pour ce type de chantier. Concepteur de la citadelle de Lille, Vauban charge Benjamin de Combes, ingénieur militaire, en mission à Dunkerque pour la création de l’arsenal, de la réalisation du port, en commençant par une tour d’artillerie.
Un chantier bouclé en 8 mois !
Benjamin de Combes (1649-1710) qui s’illustrera plus tard en réalisant les tours de Tatihou et de St Vaast-la-Hougue dans le Cotentin va se faire la main, en quelque sorte, sur Ambleteuse. Il va s’inspirer de la tour médiévale du Hâvre, une tour de 22 m de diamètre, aujourd’hui disparue. La tour d’Ambleteuse, quoique plus modeste, est élevée en seulement 8 mois, de mars à octobre 1682 !
Détail qui a son importance, la tour est uniquement accessible par une porte située à 8 m de hauteur, côté port. Pour y entrer, il faut grimper les marches d’un escalier extérieur en charpente, doté à son sommet d’un petit pont-levis pour empêcher toute intrusion. Cette disposition néo-médiévale ne facilite pas le passage des canons qui étaient hissés au sommet à l’aide d’un treuil puis redescendus dans la salle grâce à une ouverture assez large. La tour est construite en grès et en briques, grâce aux matériaux puisés en partie sur la plage.
Ambleteuse est la plus ancienne des « tours Vauban » et a sans doute servi de modèle aux tours du Cotentin. Benjamin de Combes sera un temps aidé par un autre ingénieur militaire, Jean-Pierre Traverse, qui réalisera en 1693 la tour à batterie basse de Camaret.
Christian Corvisier a retrouvé plusieurs plans d’époque signés Benjamin de Combes, ou Pierre Clément, autre ingénieur qui a travaillé sur le projet. Les auteurs nous montrent une terrasse supérieure avec 7 embrasures à canon, un logis pour le commandant de la place et des soldats, une batterie basse postérieure dès 1692 flanquée de 11 embrasures et une seconde porte d’entrée indépendante de la première, décidément mal située. Deux demi-bastions symétriques abritant chacun un bâtiment couvert d’un toit à 4 pentes. On peut y loger les hommes de troupe, côté sud, et le cheval du commandant, côté nord, ainsi que des latrines. Un four à réverbère sous l’époque impériale renforcera l’arsenal offensif de la tour en chauffant les boulets au rouge.
Une vingtaine de bouches à feu
Avec les 9 embrasures au niveau de la casemate annulaire, c’est une vingtaine de bouches à feu au total qui peuvent être déployées. Dès 1762, les créneaux seront comblés pour permettre le « tir à la barbette », les canons tirant au-dessus des remparts afin notamment de ne pas blesser les soldats de la fausse-braye, côté mer. On note aussi la création d’un mur rectiligne entre les deux bastions, et un jardin dans la cour.
A une portée de canons d’Ambleteuse, la tour d’Audresselles est beaucoup plus modeste : un seul niveau, 5 canons et 7 embrasures. A la différence d’Ambleteuse, c’est bien par une simple échelle de bois que les soldats grimpent à son sommet. D’où sans doute la confusion qui a longtemps entouré l’accès a la tour d’Ambleteuse…
A noter aussi l’apparition d’un mur à redan sur un plan daté de 1794 qui vient remplacer le muret rectiligne qui reliait les deux demi-bastions.
L’étude reste muette en revanche sur les aménagements sous la période napoléonienne . Sans doute les ingénieurs ont-ils mobilisé leur énergie sur le bassin en eau profonde pour abriter des navires de guerre et le percement du canal de Slack à travers le massif dunaire, en ignorant le fort qui n'a pas bougé depuis la Révolution. Mais c’est là une toute autre histoire…
Pourquoi Ambleteuse ? Le roi d’Angleterre, Henri VIII, avait érigé ici, deux siècles auparavant, une citadelle à cinq bastions de terre (et non de pierres) surélevés, flanqués de canonnières, suivant en cela le système bastionné inventé par les Italiens. Louis XIV découvre le site, observe la rade formée par l’estuaire de la Slack qui se remplit à chaque marée. Les galères du Roi Soleil trouveraient à Ambleteuse un hâvre naturel propre à renforcer l’arsenal militaire royal face aux navires de guerre hollandais.
Alors commissaire général des fortifications depuis 1678, Vauban est l’homme tout trouvé pour ce type de chantier. Concepteur de la citadelle de Lille, Vauban charge Benjamin de Combes, ingénieur militaire, en mission à Dunkerque pour la création de l’arsenal, de la réalisation du port, en commençant par une tour d’artillerie.
Un chantier bouclé en 8 mois !
Benjamin de Combes (1649-1710) qui s’illustrera plus tard en réalisant les tours de Tatihou et de St Vaast-la-Hougue dans le Cotentin va se faire la main, en quelque sorte, sur Ambleteuse. Il va s’inspirer de la tour médiévale du Hâvre, une tour de 22 m de diamètre, aujourd’hui disparue. La tour d’Ambleteuse, quoique plus modeste, est élevée en seulement 8 mois, de mars à octobre 1682 !
Détail qui a son importance, la tour est uniquement accessible par une porte située à 8 m de hauteur, côté port. Pour y entrer, il faut grimper les marches d’un escalier extérieur en charpente, doté à son sommet d’un petit pont-levis pour empêcher toute intrusion. Cette disposition néo-médiévale ne facilite pas le passage des canons qui étaient hissés au sommet à l’aide d’un treuil puis redescendus dans la salle grâce à une ouverture assez large. La tour est construite en grès et en briques, grâce aux matériaux puisés en partie sur la plage.
Ambleteuse est la plus ancienne des « tours Vauban » et a sans doute servi de modèle aux tours du Cotentin. Benjamin de Combes sera un temps aidé par un autre ingénieur militaire, Jean-Pierre Traverse, qui réalisera en 1693 la tour à batterie basse de Camaret.
Christian Corvisier a retrouvé plusieurs plans d’époque signés Benjamin de Combes, ou Pierre Clément, autre ingénieur qui a travaillé sur le projet. Les auteurs nous montrent une terrasse supérieure avec 7 embrasures à canon, un logis pour le commandant de la place et des soldats, une batterie basse postérieure dès 1692 flanquée de 11 embrasures et une seconde porte d’entrée indépendante de la première, décidément mal située. Deux demi-bastions symétriques abritant chacun un bâtiment couvert d’un toit à 4 pentes. On peut y loger les hommes de troupe, côté sud, et le cheval du commandant, côté nord, ainsi que des latrines. Un four à réverbère sous l’époque impériale renforcera l’arsenal offensif de la tour en chauffant les boulets au rouge.
Une vingtaine de bouches à feu
Avec les 9 embrasures au niveau de la casemate annulaire, c’est une vingtaine de bouches à feu au total qui peuvent être déployées. Dès 1762, les créneaux seront comblés pour permettre le « tir à la barbette », les canons tirant au-dessus des remparts afin notamment de ne pas blesser les soldats de la fausse-braye, côté mer. On note aussi la création d’un mur rectiligne entre les deux bastions, et un jardin dans la cour.
A une portée de canons d’Ambleteuse, la tour d’Audresselles est beaucoup plus modeste : un seul niveau, 5 canons et 7 embrasures. A la différence d’Ambleteuse, c’est bien par une simple échelle de bois que les soldats grimpent à son sommet. D’où sans doute la confusion qui a longtemps entouré l’accès a la tour d’Ambleteuse…
A noter aussi l’apparition d’un mur à redan sur un plan daté de 1794 qui vient remplacer le muret rectiligne qui reliait les deux demi-bastions.
L’étude reste muette en revanche sur les aménagements sous la période napoléonienne . Sans doute les ingénieurs ont-ils mobilisé leur énergie sur le bassin en eau profonde pour abriter des navires de guerre et le percement du canal de Slack à travers le massif dunaire, en ignorant le fort qui n'a pas bougé depuis la Révolution. Mais c’est là une toute autre histoire…